Questions fréquentes
Notre premier projet a été réalisé en 2018, la première expérimentation a donc désormais dépassé le seuil des 3 ans après quoi l’écosystème est censé devenir autonome. De ce point de vue, c’est un succès, car la plantation se porte bien. Mais à l’échelle du temps des arbres et des forêts, ce recul n’est pas encore suffisant pour juger du devenir des sites plantés : il faut continuer à suivre ! Expérimenter des plantations autour de nous permettra de recueillir de plus en plus de données pour tirer des conclusions vraiment fondées sur des cas réels.
Il y a plusieurs points à considérer lorsque nous considérons la densité des plantations avec la méthode Miyawaki.
- Dans une forêt en libre évolution, c’est-à-dire qui n’est pas exploitée, la densité de la végétation est bien supérieure à celle dont nous avons l’habitude dans les forêts claires où nous nous promenons, exploitées pour la ressource bois (ce qui implique d’avoir de grands arbres droits, bien espacés pour produire des fûts droits et laisser passer les machines), et sécurisées pour les promenades champêtres. C’est un type de végétation en libre évolution que nous cherchons à recréer avec nos plantations.
- Les végétaux plantés ne sont pas tous des arbres de haut jet, c’est-à-dire de futurs géants comme les chênes ou les hêtres : il y a aussi des arbustes qui iront moins hauts, et tous ces arbres et arbustes font partie d’une même communauté végétale, c’est-à-dire qu’ils sont habitués à pousser ensemble dans la nature. Il y a donc une organisation naturelle de l’espace qui s’opère au bout de quelques années.
- La grande densité permet aux végétaux de former très vite un micro-climat sur le site : leurs feuilles, même peu nombreuses sur chaque arbre, vont vite fermer le lieu, c’est-à-dire capter l’essentiel de la lumière du soleil qui n’atteindra plus le sol. Cela entraîne plusieurs conséquences bénéfiques pour le lieu : des températures moins élevées au sol, une meilleure rétention d’eau, moins de lumière pour les herbes folles qui pourraient concurrencer les jeunes arbres dans leur développement initial. Une étude menée en Sardaigne, dans un milieu présenté comme très hostile à la reforestation du fait de la sécheresse et du vent, souligne que les bénéfices de la densité dépassent les inconvénients qui lui seraient liées, comme une mortalité de certains plants au bout de quelques années : c’est-à-dire que les arbres sont plus résistants dans leur ensemble, que s’ils avaient été plantés de manière plus espacées, moins nombreux, ce qui les laisse plus vulnérables et entraîne donc, dans ce contexte très hostile, plus de pertes encore.
Il ne faut donc pas croire que la méthode Miyawaki permet de planter magiquement plus d’arbres sur moins de surfaces : à terme, une sélection s’opère entre les différents végétaux, mais cela fait partie d’une processus naturel de sélection, qui garantit la santé de l’écosystème dans son ensemble en favorisant les sujets les plus résistants aux conditions locales. Pour autant, sur les plantations que nous avons réalisées, nous constatons pour le moment que la densité reste très forte dans les premières années, au point qu’il devient vite très difficile de passer entre les arbres pour désherber !
Ces chiffres sont bien issus d’une étude sérieuse effectuée sur dix ans, mais sont souvent cités à rebours du propos même de l’étude.
L’étude en question s’intitule “Effectiveness of the Miyawaki method in Mediterranean forest restoration programs“, elle a été publiée dans la revue scientifique International Consortium of Landscape and Ecological Engineering and Springer 2010 et est le fruit d’un travail mené par Bartolomeo Schirone, Antonello Salis et Federico Vessella. Cette étude, comme son nom l’indique, a eu pour objectif d’évaluer l’efficacité de la méthode Miyawaki pour des opérations de restauration forestière en milieu méditerranéen. Une vigilance donc quand on cite cette étude comme “la seule européenne” et qu’on extrapole les résultats à tous les climats européens, notamment français. Les auteurs soulignent d’ailleurs clairement dans l’étude la nature très hostile du site de plantation : “le défi supplémentaire d’un climat saisonnier caractérisé par l’aridité de l’été, aggravée dans plusieurs cas par le froid hivernal, ainsi que par des sols peu épais. ” C’est parce que les conditions forestières ont été dégradées fortement depuis plusieurs millénaires que les auteurs considèrent qu’il est intéressant de voir si la méthode Miyawaki permet de restaurer de façon plus efficace les forêts que les méthodes qui ont été testées jusqu’alors.
C’est donc d’une étude comparative qu’il s’agit. Deux expérimentations inspirées de la méthode Miyawaki ont été menées, mais avec des variations notables, notamment l’absence d’apport d’amendement du sol (une donnée pourtant souvent cruciale dans la préparation), puis elles ont été comparées avec des parcelles ou des reboisements plus traditionnels ont été effectués (voir les détails dans l’étude). Les taux de mortalité évoqués dans la question entrent ici en jeu. Les auteurs donnent toutefois beaucoup de contexte qu’on ne peut pas ignorer pour les expliquer : “Il faut garder à l’esprit que sur le même site, d’autres programmes de reboisement avec des méthodes traditionnelles ont échoué.” De ce point de vue, il faudrait plutôt considérer les plants qui ont bel et bien poussé que ceux n’ont pas pu le faire.
Après comparaison au bout de plusieurs années avec les parcelles témoins, les auteurs rapportent une densité de plantes 4 à 5 fois supérieure à celle des plantations traditionnelles.
La conclusion de l’étude, comme son titre, tend à souligner l’efficacité de la méthode avec prudence, mais sans ambiguïté : “Les résultats ont montré un développement plus rapide des arbres sur les parcelles de Miyawaki, en particulier, les espèces de début de succession. Les avantages par rapport aux méthodes précédentes sont remarquables et comparables à ceux obtenus par Miyawaki en Asie et en Amérique du Sud.“
Il est donc plutôt clair que les personnes citant cette étude pour critiquer l’efficacité de la méthode ne l’ont pas lue. L’ironie est savoureuse : nous avions connaissance de cette étude avant de nous lancer dans l’aventure Boomforest, et elle fait même partie des documents scientifiques qui nous ont encouragé à nous lancer !
Il n’y a pas de taille minimale à proprement parler : vous pouvez planter partout autour de vous ! Toutefois, pour qu’une plantation puisse reformer une communauté végétale complète et suffisamment riche pour bien fonctionner de manière résilience, avec un extérieur et un intérieur, nous considérons que 200m² représentent un seuil en-dessous duquel il vaut mieux considérer d’autres méthodes de végétalisation, qui pourront être plus efficace compte tenu de l’espace.
Un projet pilote raisonnable se situe autour de 500m².
Les plants que nous utilisons proviennent de pépiniéristes professionnels, que nous cherchons dans les alentours les plus immédiats de la plantation. Dans la mesure du possible, nous privilégions des plants en végétal local : voir le site qui référence des pépiniéristes engagés dans cette démarche.
Nous n’avons pas encore de pépinière en propre, mais le sujet nous intéresse beaucoup, et plusieurs membres de l’association ont commencé à faire pousser des graines chez eux, sur leur terrain voire leur balcon, dans un objectif expérimental. La démarche suit son cours, et nous avons déjà pu planter plusieurs centaines de petits chênes 100% locaux, issus de graines collectés en ville, là les plants ont été replantés !